Faire face et s'adapter – La transition comme trajectoire non stabilisée dans les forêts du Haut-Languedoc
Jonathan Lenglet  1@  
1 : AgroParisTech
Université de Lorraine, AgroParisTech, INRAE, UMR Silva, 54000 Nancy, France

Le territoire du parc naturel régional Haut-Languedoc est marqué par une forte hétérogénéité entre une forêt récente aux dynamiques contrastées sur sa frange atlantique, composée en majorité de résineux et inscrite dans des logiques économiques et industrielles, et une forêt méditerranéenne, composée de feuillus, faiblement valorisée dans l'industrie. Le territoire se retrouve actuellement confronté à des modifications des équilibres territoriaux, en particulier face aux incertitudes induites par le changement climatique et ses conséquences sur les écosystèmes, les paysages et la ressource en eau. Ces évolutions incitent les forestiers et plus largement les citoyens à remettre en question les pratiques sylvicoles à l'œuvre jusque-là pour relever le défi climatique, laissant supposer de transformations à venir dans les territoires forestiers.


Notre étude s'appuie sur une enquête de terrain réalisée en 2021 au sein du parc naturel régional du Haut-Languedoc, sur la base d'entretiens avec les acteurs du territoire, de séquences d'observation et d'ateliers participatifs. Nous proposons d'étudier les processus de (non-)transition à l'œuvre sur le territoire, en particulier au regard des problématiques forestières. L'analyse s'appuie sur la formalisation d'une trajectoire territoriale, influencée en particulier par l'évolution du rapport aux ressources et des modes de gouvernance, permettant de mettre en évidence la place de l'innovation dans la mise en œuvre de la transition.


Les résultats mettent en évidence l'instabilité qui caractérise pour l'heure la trajectoire de transition forestière dans le Haut-Languedoc. Plusieurs enjeux d'importance sont mis en avant par les acteurs, les incitant à l'action et à repenser leurs pratiques et leurs interactions : la fragilité perçue de la forêt languedocienne, l'émergence de tensions autour des modes de gestion et des pratiques sylvicoles, la difficulté pour les acteurs locaux à valoriser les ressources dont ils disposent et à porter un projet de filière collectif et cohérent. L'enquête indique qu'aux côtés des acteurs classiques de la filière forêt-bois, de nouveaux acteurs comme les collectivités territoriales émergent et contribuent aux réflexions et aux projets traitant de l'enjeu de l'adaptation des espaces forestiers au changement climatique et de la valorisation en circuit court du bois local. La légitimité de ces nouveaux acteurs apparaît néanmoins comme discutée. Si le territoire semble bien engagé sur la voie d'un changement profond, le secteur forestier reste en retrait par rapport à d'autres, bien plus avancés et au sein desquels des collectifs constitués portent des projets globaux mieux définis (énergie, agriculture, tourisme par exemple). Pourtant, face aux changements climatiques, l'ensemble des acteurs s'accorde sur l'existence d'un problème qui menace les écosystèmes et les systèmes de production. Nous observons que ce motif d'action, combiné à d'autres, plus ponctuels comme les mobilisations autour des grands projets constituent autant de motifs d'action, lesquels peuvent ensuite donner naissance à des initiatives, notamment alternatives. Ces dernières en revanche bénéficieraient d'un portage plus coordonné et d'une meilleure mise en relation afin d'assurer leur développement et leur diffusion. Ce point semble être la principale limite et se retrouve confronté à des postures et des représentations fortes et souvent divergentes ainsi qu'à un isolement de certains acteurs, empêchant l'ensemble du système de tirer profit des effets bénéfiques d'une proximité pourtant mobilisable mais qui fait aujourd'hui défaut pour permettre le portage d'une démarche globale de transition


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